► Article récapitulatif sur l’univers de la série et ses conséquences.
Suite et fin de la « révolution métal » de DC Comics dans ce troisième tome. Après un premier volet original, audacieux mais très indigeste et (inutilement) complexe, puis un second mieux rythmé, singulier et plaisant, que vaut cette ultime salve ?
[Résumés de l’éditeur]
Tome 01 : Enquêtant sur l’existence et les propriétés de différents métaux disséminés à travers la planète depuis des millénaires, Batman découvre un portail ouvrant sur un anti-multivers (le « Multivers Noir », nda) ; des dimensions parallèles où l’Histoire a déraillé et où des Chevaliers Noirs terrifiants ont supprimé les membres de la Ligue de Justice. Aujourd’hui, ces derniers décident d’envahir notre dimension.
Tome 02 : Alors que les plans de Barbatos concernant Batman apparaissent au grand jour, ses agents du Multivers Noir pénètrent notre réalité et confrontent leurs membres référents de la Ligue de Justice. Mais qui sont en réalité le Dévastateur, Red Death, la Noyée ou bien encore le Batman qui Rit, ces Chevaliers Noirs qui tous semblent être une version déformée du plus grand des justiciers, Batman ?
Tome 03 : Les Chevaliers Noirs contre la Ligue de Justice : le Multivers contre le Multivers Noir. Alors que Batman et Superman se retrouvent capturés et prisonniers d’une des tours de Barbatos, les derniers super-héros libres tentent tant bien que mal de réunir les différents métaux capables de leur assurer une victoire décisive et de leur permettre de sauver de l’extinction les nombreuses réalités parallèles.
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Ce dernier tome se divise de la façon suivante : De la bouche de l’enfer (quatre chapitres provenant de plusieurs séries (The Flash #33, Justice League #32 et #33 et enfin Hal Jordan and The Green Lantern Corps #32), la série mère Batman Metal (ses trois derniers chapitres), entrecoupés d’épisodes en marge comme Retrouvé (sur Hawkman) et La Traque Sauvage (sur Les Chevaliers Noirs).
[Histoire]
Sept jours après l’apparition du Mont Challenger à Gotham City et des Chevaliers Noirs de Barbatos (menés par le Batman Qui Rit), Superman rejoint Batman dans le Multviers Noir pour le sauver (déjà vu en fin du volume précédent).
Trois équipes de super-héros se rendent à divers endroits afin de récupérer du « Métal N », qui pourrait vaincre les sbires de Barbatos. Wonder Woman, Kendra et le Dr Fate vont au rocher de l’éternité. Green Lantern et Mister Terrific dans l’espace vers l’empire Thanagarien. Aquaman et Deathstroke dans les profondeurs enfouis de l’Atlantide. Mais très vite, tous vont affronter les Chevaliers Noirs maléfiques. Murder Machine et Devastator retrouvent Steel et Flash (qui avaient aidé Superman à rejoindre le Multivers Noir). Soudainement, Cyborg réapparaît aussi…
Très vite, tout le monde est séparé et la Justice League doit compter sur chacun de ses membres, à l’exception de Batman (disparu) et Superman (piégé dans le Multivers Noirs). Ainsi, Wonder Woman, Flash, Green Lantern, Aquaman et Cyborg sont les derniers espoirs de l’humanité et du Multivers. Chacun débarque dans une Batcave bien particulière…
[Critique]
Cette conclusion est une semi-réussite (ou un semi-raté, c’est selon). Les délires de Scott Snyder vont dans trop de sens et plusieurs ne fonctionnent pas, beaucoup éparpillés depuis le début de la série et certains condensés dans sa dernière ligne droite (la deuxième moitié de ce livre) : les vibrations au rythme de la musique (Batman « Metal » si on n’avait toujours pas compris…), l’échappée littéraire de Sandman, la profusion de personnages secondaires pas forcément connus de tous les lecteurs sans qu’ils soient habilement introduits (Raven, les Metal Men, Mr Terrific, Plastic Man…), le (trop grand) rôle étonnant de Hawkman, la puissance des singes (!), une 53ème Terre en deus ex machina (avec foule de Batman : celui du Dark Knight Returns, de Vampire, de Red Son… mais hélas pas du tout exploités), un autre coup magique pour se sortir de tout ce bordel (qu’on ne dévoilera pas ici mais d’une paresse intellectuelle et bêtise confondante presque), un Dragon Joker (si, si !), les tribus préhistoriques, des nouveaux métaux indispensables, la répétition multiple de la phrase « toutes les routes mènent aux ténèbres » et ainsi de suite. Difficile de ne pas être perdu ou de trouver tout ça très cohérent et palpitant.
Néanmoins, d’autres éléments, plus positifs, sont à retenir. À commencer par toute la première moitié du livre qui fonctionne très bien avec les recherches et aventures des membres restants de la Justice League (sans Batman et Superman donc). La résolution du combat entre le Batman Qui Rit face à deux adversaires inédits (et, in fine, logique) est plutôt jouissive et limite culte. Le spectacle visuel et épique de l’acte final, malgré sa bouillie narrative et complexe, vaut aussi le détour.
Comme souvent chez Snyder (tout comme J. J. Abrams au cinéma et à la télévision), on sait débuter ses récits par des concepts soignés, originaux et intrigants mais on ne sait plus trop comment les résoudre en cours de route. C’est évoqué en conclusion : toute cette guerre n’est finalement qu’un commencement (voir fin d’article pour les conséquences). À l’instar des deux volets précédents, l’auteur pioche dans quelques épisodes de DC Comics des avatars plus ou moins populaires. Hawkman et ses réincarnations (un support matériel artistique peu publié en France), le démon Onimar Synn (vu dans Infinite Crisis), l’étoile de mer maléfique Starro (Justice League Anthologie, DC Comics Anthologie) ou encore le vaisseau Ultima Thule (Final Crisis). Ce travail rappelle évidemment celui de Grant Morrison (qui a aussi contribué au dernier chapitre Batman Metal) et ravira les fidèles de longue date. Chez les autres, cela passera sans doute moins bien (tout comme la lecture du run de Morrison par des non-initiés).
Niveau protagonistes, une certaine diversité équilibrée se dégage. Flash, Green Lantern et Cyborg occupent une place importante durant le premier tiers du livre. Une aubaine pour Cyborg, souvent relégué à un rôle très secondaire au sein de la Ligue. Hawkman/Carter est au premier plan à la moitié de l’ouvrage lors du chapitre qui lui est consacré. S’il est moins plombant que d’autres, il reste expéditif, offrant un aparté au moment où Superman et Batman le rejoignent, à la Forge. On retrouve ensuite le singe Bobo/Detective Chimp et (brièvement) les Metal Men puis le fameux Batman Qui Rit et ses Chevaliers Noirs. Wonder Woman est à nouveau la super-héroïne de choc pour la confrontation finale (un peu comme dans La Guerre de Darkseid). Étrangement, on aurait aimé suivre Lex Luthor aussi dans ce gros bazar (on apprend d’ailleurs qu’un Bruce Wayne a fusionné avec Luthor dans une des dimensions du Multivers Noir — on veut le découvrir !) et visiblement les quelques morts semés sont vite oubliés (comme Mera, qui ne réapparaît pourtant pas malgré un Aquaman qui continue d’être tout sourire à la fin…).
Une fois de plus, c’est la folie concernant les équipes artistiques. Outre Scott Snyder et James Tynion IV à l’écriture, d’autres auteurs se succèdent : Josh Williamson, Robert Venditti, Jeff Lemire et, comme déjà évoqué, Grant Morrison. Aux dessins, sur la série principale, Greg Capullo est en moyenne forme : ses différents visages sont trop ressemblants, ses figurants sont dans un style graphique proche d’un brouillon de Miller… Toutefois, son ultime chapitre est dantesque par ses batailles et combats homérique. Une dizaine d’autres artistes alternent les planches du volume : Liam Sharp, Doug Mahnke, Howard Porter, Jorge Jimenez, Ethan Van Sciver, Tyler Kirkham, Mikel Janin, Byan Hitch et Alvaro Martinez. Et autant aux couleurs bien sûr.
Toute cette épopée (l’entièreté de Batman Metal) est donc parfois lourdingue, parfois plaisante, certes audacieuse et assez originale mais plombée par une lecture pénible et des enjeux incompréhensibles avec des explications confuses ; à l’image de ce troisième tome, épuisant. On retient donc surtout le deuxième, centré sur les Chevaliers Noirs fous, comme pépite singulière et passionnante. D’une manière générale, ce sont d’ailleurs les chapitres des séries connectées et non de la principale qui sont les plus réussis, un comble ! Le Batman Qui Rit reste sans nul doute la meilleure création de l’ensemble, un nouvel antagoniste charismatique, effrayant et paradoxalement séduisant.
D’autres titres se déroulent après Batman Metal (l’épilogue laisse peu de places au doute de certaines conséquences de toute façon) ; à commencer par le one-shot No Justice, qui débouche ensuite sur la série New Justice (équivalent de relaunch de la Justice League). La série dérivée Le Batman Qui Rit se suit en un tome éponyme (plus ou moins indépendant) puis un second (idem), intitulé Les Infectés, qui se situe en marge de Justice League : Doom War. Enfin tout cela converge vers Death Metal, prévu en France d’ici la fin de l’année.
[À propos]
Publié en France chez Urban Comics le 2 novembre 2018.
Scénario : collectif (voir article)
Dessin : collectif (voir article)
Encrage additionnel : collectif
Couleurs : collectif
Traduction : Edmond Tourriol (Studio Makma)
Lettrage : Stephan Boschat (Studio Makma)
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