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Batman Detective Comics – Tome 01 : La colonie

Seconde série pour le Chevalier Noir sous l’ère Rebirth (la principale étant Batman Rebirth) : Batman – Detective Comics (du prestigieux nom originel de l’éditeur et de la première bande dessinée sur Batman de 1938) reprend sa numérotation au #934 * et fait (plus ou moins) suite aux évènements des séries Batman Eternal et Batman & Robin Eternal. Scénarisées par le même auteur, James Tynion IV, ces deux longues histoires mettaient en avant une version moderne de certains personnages dont Stephanie Brown, alias Spoiler, et Cassandra Cain, alias Orphan. Les deux jeunes femmes ont par ailleurs endossé par le passé (dans la continuité de la collection Classiques) le costume de Batgirl (dans Grant Morrison présente Batman et la saga No Man’s Land). Découverte et critique du premier tome sur les sept qui forment cette série.

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[Histoire]
Une cathédrale a été dévastée. Batman s’est rendu sur les lieux, a affronté Azraël et a trouvé un mystérieux petit drone. Le Chevalier Noir est persuadé qu’un groupe espionne les justiciers de Gotham et demande de l’aide à Batwoman. Il lui révèle même sa véritable identité pour prouver qu’il a confiance en elle. La jeune femme, Kathy Kanes, est la cousine de Bruce Wayne et savait déjà qu’il était le justicier nocturne.

Batman et Batwoman forment une nouvelle équipe composée de Red Robin, Spoiler, Orphan et… Gueule d’Argile ! Le Dark Knight et sa nouvelle alliée sont donc à la tête de cette petite league gothamienne et souhaitent entraîner ces quatre autres justiciers pour devenir de véritables héros.

Dans l’ombre, une armée, une colonie, dirigée par un énigmatique leader compte bien s’opposer à Batman et sa team

[Critique]
La colonie est une entrée en matière somme toute classique pour un nouveau venu ou un fan de longue date. Cette série propose une équipe originale emmenée par Batman et Batwoman, c’est clairement le point fort du récit car le reste est scénaristiquement assez moyen. En effet, la nouvelle menace, la fameuse colonie, une armée de mercenaires adulant Batman, est assez risible et dirigée par une personne dont on devine extrêmement vite l’identité. Peu de mystères ou tensions sur ce sujet donc, au même titre que la narration est assez convenue, loupant quelques moments épiques (une tragédie pouvait conclure audacieusement la fiction, il n’en est rien à cause des toutes dernières cases…). Quant à ses personnages charismatiques, le scénariste James Tynion IV les survole (à l’exception de Batwoman et Batman, tous deux moins empathiques que les autres et le second assez en retrait – deux êtres solitaires forcés de s’épauler).

Les pouvoirs de transformation de Gueule d’Argile ne sont pas du tout utilisés (et on ne sait pas trop pourquoi il a été choisi, peut-être suite aux évènements relatées à la fin de la série Batman, le Chevalier Noir) et ses collègues justiciers très peu exploités ; on ne sait pas grand chose d’Orphan qui reste mutique, Spoiler est en relation avec Red Robin le temps de quelques cases (une idylle à peine esquissée) et Tim Drake, même s’il est un brin plus mis en avant que ses trois nouveaux alliés, aurait mérité mieux. Tout cela est assez dommage donc… L’alchimie de cette équipe peut fonctionner mais elle est mal développée pour l’instant.

Heureusement, ce premier tome bénéficie d’un rythme assez haletant, qui permet de se lire vite et bien, avec des planches de bonnes factures même si l’ensemble manque un peu de relief parfois, au niveau des visages notamment. Il y a beaucoup de lecture « horizontale », c’est-à-dire étalée sur deux planches. Hélas, la lisibilité de celles-ci n’est pas intuitive, on se surprend donc à relire « dans le bon ordre » car de prime abord, ça ne saute pas aux yeux. Les dessins sont assurés majoritairement par Eddy Barrows, qui avait signé la série Nightwing de l’ère New 52/Renaissance (elle aussi assez moyenne).

Alvaro Martinez et Al Barrionuevo le remplacent le temps de trois chapitres (sur sept), gardant un style semblable et, de facto, une homogénéité graphique assez plaisante tout le long du comic book. Il faut dire que le rythme de publication étant bimensuelle aux États-Unis, impossible de tenir la cadence avec un seul artiste aux pinceaux. Certains dessins sont, a priori, pas encrés et juste colorisés aux tons pastels (conférant une délicate ressemblance à de l’aquarelle). Il s’agit souvent de personnages en arrière-plan (Gueule d’Argile, Batwoman…) d’une planche qui épouse les cases autour, plus classiques et conventionnelles elles, ou bien de flash-backs. Le résultat est extrêmement soigné et réussi.

Malgré la tonne de références à des séries autour du Chevalier Noir (Batman, Batman Eternal, Batman & Robin Eternal, Batman Rebirth et All-Star Batman), le lecteur n’est pas perdu. Passons les hommages appuyés pas du tout subtiles à The Dark Knight Returns… On aurait aimé voir davantage Azraël, Leslie Thompkins (ici, plus jeune qu’à l’accoutumée), Bruce Wayne en civil (on voit uniquement Batman) et – comme déjà souligné – une caractérisation plus poussée des membres de cette équipe qui fonctionne plutôt bien au demeurant et (là aussi on l’a déjà dit) est très originale et charismatique !

En synthèse, on apprécie surtout les graphismes et leurs colorisations, le concept de la série avec cette league atypique et c’est à peu près tout pour l’instant. Les plus optimistes fermeront sans doute les yeux sur les défauts afin d’envisager la suite avec espoir ; ceux qui sont plus exigeants de base seront sans aucun doute déçus et ne pousseront probablement pas à se tourner vers les volumes suivants… Une nouvelle série en demi-teinte donc, qui ravira par contre les fans de Batwoman, extrêmement présente tout le long (elle pourrait donner son nom à l’ouvrage tant elle est importante pour le scénario). Bref, sur ce site on y croit pour l’instant mais on espère surtout une mise en avant plus prononcée de Gueule d’Argile, Orphan et Spoiler !

* Pour l’anecdote un peu complexe : les 52 chapitres précédents, donc du #882 au #933, incluant un chapitre #0 inédit, sont en fait la série Detective Comics #00-#52 de la période New 52 (publiés en France dans les magazines Batman Saga). DC Comics a choisi de « renommer » les nouveaux chapitres de cette « nouvelle » série à partir de #934 pour faire comme si ceux des New 52 avaient existé dans la chronologie officielle. Il faut donc remonter au chapitre #881, la fin de Sombre Reflet, paru en 2011 avant le relaunch New 52, pour retrouver l’appellation d’origine.

[À propos]

Publié en France chez Urban le 7 juillet 2017 et dans le magazine Batman Rebirth #1 à #3 (juin à août 2017).
Contient Detective Comics #934-940 (La colonie – Chapitres 1 à 7)

Scénario : James Tynion IV
Dessin : Eddy Barrows (ch. 1-2, 6-7), Alvaro Martinez (ch. 3-5), Al Barrionuevo (ch. 5)
Encrage : Éber Ferreira (ch. 1-2, 6-7), Raul Fernandez (ch. 3-5)
Couleur : Adriano Lucas (ch. 1-2, 5-7) Brad Anderson (ch. 3-5)

Traduction : Thomas Davier
Lettrage : Stephen Boschat (Studio MAKMA)

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Crimes de Guerre

Il est nécessaire d’avoir lu Jeux de Guerre avant d’entamer cette histoire (et par conséquent cette critique).

Batman Crimes de Guerre Cover[Histoire]
Pendant la guerre des gangs qui a fait rage à Gotham City, Stephanie Brown, alias Spoiler, a été torturée à mort par Black Mask. Ce dernier dirige désormais une bonne partie de la mafia de la ville.

Batman reçoit anonymement une cassette vidéo présentant une interview d’Aaron Black, un citoyen défiguré qui remet en cause l’efficacité de la police et les services du Dark Knight. Le journaliste qui mène l’entretien est celui qui avait filmé Black Mask pendant ses méfaits lors des Jeux de Guerre. Il lance une vendetta médiatique contre Batman, affirmant que ce dernier est responsable de la mort de Spoiler. Il dévoile même l’identité civile de la jeune fille, ainsi que son association éphémère en tant que Robin avec le Chevalier Noir !

Batman enquête sur la mort de Spoiler et découvre qu’une de ses médecins a été tuée et que le docteur Leslie Thompkins, fidèle alliée depuis l’enfance de Bruce Wayne, est portée disparue. L’homme chauve-souris est bien décidé à interroger le mystérieux Aaron Black mais son éternel rival, Le Joker, s’incruste dans cette complexe affaire.

Batman Crimes de Guerre Bruce[Critique]
Plusieurs mystères parcourent le récit. Ceux-ci sont habilement distillés entre les planches à qualité variable. Effectivement, les dessins ne sont pas terribles ; à l’instar de Jeux de Guerre, la qualité graphique varie et n’est guère mémorable. Côté scénario, le potentiel de départ est très alléchant : Spoiler aurait-elle pu survivre ? Les médias peuvent-ils définitivement ruiner l’image publique de Batman ? Le justicier de la ville est-il si fiable que cela ?

Une bonne partie de l’histoire résout efficacement ses interrogations. Le Joker tient un rôle mineur mais sa justification colle tout à fait au personnage et sa confrontation finale avec Black Mask est plutôt drôle et bien pensée. Romain Sionis est d’ailleurs toujours aussi effrayant. Il revêt la cape du Dark Knight pour se faire passer pour lui, là encore c’est une bonne idée. Mais son arrestation, ainsi que celle du Joker, est plutôt expéditive, surtout pour un criminel de cette envergure, qui a tenu en échec Batman pendant quelques temps.

Batman Crimes de Guerre Black MaskMais outre ce léger défaut, c’est la véritable fin donnée au récit qui peut totalement décontenancer, à savoir l’identité du véritable « meurtrier » de Spoiler. Si ses motivations peuvent « se comprendre », on a du mal à croire que le personnage est capable de cela. Une personne au code moral infaillible laissant mourir une innocente de seize ans, vraiment ? Cette conclusion, très froide et noire, a d’ailleurs suscité beaucoup de réactions outre-Atlantique au moment de la publication. La polémique a même donné naissance à un mouvement féministe au sein des comics, orchestrée par l’auteure Gail Simone (qui travaille sur la série Batgirl depuis 2011).

Comme dans Jeux de Guerre, Crimes de Guerre bénéficie d’un scénario haletant et sans temps mort, une bonne suite qui ne s’éparpille pas. Les échanges sont pertinents et l’ensemble relativement sombre. Le Joker apporte une touche comique mais il est vraiment en retrait. On pourra déplorer la chute un peu trop facile de Black Mask mais les solutions des mystères sont bien trouvées. Excepté donc : le tueur de Spoiler. Qui aura peut-être du mal à convaincre l’ensemble des lecteurs. Le culot de la direction éditoriale de l’époque n’était peut-être pas une bonne idée. Selon la post-face du magazine, les « conséquences » de cette révélation sont à découvrir dans Infinite Crisis.

Batman Crimes de Guerre JokerÀ noter un prologue publié dans le numéro précédent (Batman #18) : Batman Allies Secret Files 2005 – Contact. Cette courte histoire montre Cassandra (Batgirl) et Timothy (Robin) s’entraîner dans la Bat-Cave et se souvenir de la mort de Stephanie Brown, alias Spoiler, survenue dans Jeux de Guerre. Après avoir arrêté des cambrioleurs dans un musée, ils découvrent à la télévision qu’un journaliste prévoit de dévoiler que Batman entraîne et recrute des enfants de seize qui meurent… On y apprend principalement que Timothy admire Batman tout en le trouvant effrayant et ne veut surtout pas lui ressembler. Le reste faisant office de « bande-annonce ».

[À propos]
Publiée en France chez Panini Comics dans Batman #19 (décembre 2006).

Titre original : War Crimes
Scénario et Dessin (se référer à l’index complet pour plus de détails)
Detective Comics : Andersen Gabrych et Pete Woods
Batman : Bill Willingham et Giuseppe Camuncoli

Chapitre 01 – Detective Comics #809 : Faux Semblant (To the Victor go the Spoils)
Chapitre 02 – Batman #643 : Divergences de Vues (Minor Discrepancies)
Chapitre 03 – Detective Comics #810 : Bataille Médiatique (A Consequence of Truth)
Chapitre 04 – Batman #644 : Terrible Verdict (Judgment at Gotham)

Traduction : Sophie Viévard

Première publication originale dans les magazines des séries respectives en octobre 2005.