Après une introduction poussive mais graphiquement séduisante, le Chevalier Noir est de retour dans son opéra baroque singulier.
[Résumé de l’éditeur]
Les démons ont phagocyté Gotham et patientent dans l’ombre pour prendre le contrôle total de la ville. Batman, plus affaibli que jamais suite à sa dernière confrontation, ne parvient pas à démêler ce terrifiant mystère : qui sont ces monstres rôdant dans le noir, et qui semblent bien décidés à bouleverser jusqu’aux fondements de la cité maudite ? La réponse se trouve pourtant sous son nez alors que la famille Orgham jette son dévolu sur l’asile d’Arkham, bien décidé à reprendre le contrôle de leur héritage ancestral sur la ville, par la force la plus brutale si nécessaire.
[Début de l’histoire]
Batman/Bruce se remet de ses blessures chez Gordon.
En parallèle, la famille royale Orgham devient populaire dans Gotham. Arzen (le fils prodigue) se rapproche même de Wayne…
Double-Face est de retour dans la ville, poussé dans sa face maléfique par le mystérieux Gael. Ce dernier, pouvant se transformer en loup, veut aussi enrôler Mr. Freeze (grâce à son gaz magique l’Azmer).
[Critique]
Cette fois, l’auteur Ram V va davantage droit au but, sa narration est plus limpide, les enjeux davantage compréhensibles même s’il convoque beaucoup trop de personnages secondaires, utilisés de façon déséquilibrés (les Orgham n’apparaissent qu’au début par exemple) et en ajoutent encore des nouveaux (dans sa conclusion). Ça commence à faire beaucoup… En revanche, Double-Face est particulièrement bien mis en avant, grâce à un segment dédié issu des backs-up et une place de choix dans l’intrigue. Les fans d’Harvey Dent y trouveront assurément leur compte !
Quant au reste, il y a donc Freeze qui intervient sporadiquement, une mention à un autre célèbre ennemi qui se connecte à la lignée des Orgham (ce qui n’est guère surprenant) mais qui n’est pas encore développé. Le récit suit surtout Batman/Bruce et son cheminement atypique, à moitié brisé, à moitié confiant, dans un ensemble plaisant corrélé aux avancées des Orgham et Double-Face dans Gotham City. Paradoxalement, il y a une vague impression de stagner car il y a eu peu de changements radicaux par rapport au premier opus.
Néanmoins, ce Premier acte se lit sans déplaisir, bien rythmé, mieux agencé et part moins dans tous les sens que le précédent volume, malgré sa dimension multiple : le registre fantastique est toujours présent, les protagonistes sont nombreux, les enjeux toujours un peu obscurs et en même temps un peu clichés (reprendre le contrôle de la ville, vraiment ?)… Voir Batman secouru par Freeze et Dent est en revanche, assez réjouissant ! Graphiquement, Ivan Reis occupe quasiment la moitié du titre, le dessinateur livre une prestation honorable sans pour autant faire d’éclat (il manque des séquences épiques ou solaires qu’il aurait magnifiées, cf. ses travaux sur Justice League ou, plus récemment, sur One Bad Day – Ra’s al Ghul).
Plusieurs dessinateurs officient ensuite, certains sur la série principale (Rafael Albuquerque à nouveau – lui qui avait signé l’entièreté du premier tome –, Dexter Soy, Stefano Raffaele et Miguel Mandonca) et d’autres en back-up (une fois de plus Dani pour l’interlude sur Gordon mais, surtout Hayden Sherman, pour celui sur Dent, complètement psychédélique et passionnant (mais clivant) de bout en bout, tranchant complètement avec le reste de la fiction, que ce soit au niveau du scénario ou des illustrations). On apprécie, encore, les couvertures des chapitres d’Evan Cagle et la riche galerie en fin d’ouvrage.
Ce second volet de Batman Nocture poursuit donc l’incursion mi-gothique, mi-introspective, entamée par Ram V, de façon honorable. On a encore du mal à situer où l’auteur veut en venir et si son run est prometteur suite à un mauvais équilibre de tout ce qu’il met en place (et, on l’avoue humblement, la dynastie Orgham et ses alliés ne font ni chauds ni froids – le gros problème de cette série). Ceux qui ont apprécié le premier tome n’auront aucun mal à se laisser séduire par celui-ci, ceux qui avaient peu accroché en revanche (le cas de l’auteur de ces lignes) y trouveront davantage leur compte.
Néanmoins, il est toujours difficile de conseiller la série, les promesses initiales ne sont pas particulièrement stimulantes, les graphismes moins homogènes et l’écriture parfois en-deça. Attendons (encore) le troisième tome afin de savoir s’il faut franchir le pas de l’achat…
[À propos]
Publié chez Urban Comics le 20 octobre 2023.
Contient : Detective Comics #1066-1070 + back-up
Nombre de pages : 176
Scénario : Ram V, Simon Spurrier
Dessin & encrage : Ivan Reis, Rafael Albuquerque, Dexter Soy, Hayden Sherman, Dani, Stefano Raffaele, Miguel Mendonça, Danny Miki
Couleur : Dave Stewart, Adriano Lucas, Nick Filardi, Lee Loughridge
Traduction : Thomas Davier
Lettrage : MAKMA (Gaël Legeard, Sarah Grassart, Lorine Roy et Stephan Boschat)
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