Page récapitulative de la série Gotham.
Après une excellente première partie (comportant encore certains défauts côté casting et écriture de personnages tout de même), que vaut cette seconde salve intitulée Wrath of the Villains (« La colère des méchants ») ?
L’histoire reprend peu après la fin de l’épisode précédent : Gordon est blanchi des accusations du meurtre de Theo Galavan et Le Pingouin est activement recherché (et rapidement trouvé puis enfermé à Arkham). La grande nouveauté est l’arrivée de Victor Fries/Mister Freeze (Nathan Darrow — assez moyen). Sans surprise, sa romance tragique avec sa femme malade (brillamment illustrée dans la série d’animation, les jeux vidéo de la saga Arkham et dans les comics) prend place aussi ici. Les effets spéciaux de ses armes et les victimes congelés sont plus réussis que les précédents effets visuels. Dommage d’avoir réellement « tué » Nora si tôt et de dévoiler un ennemi emblématique des années avant la véritable arrivée de Batman.
Cette deuxième partie est un peu plus décousue que la première mais il y a toujours des fils narratifs continus, le principal avec l’asile d’Arkham et son sous-sol des expérimentation du Dr. Hugo Strange (campé par le normalement très bon B.D. Wong, vu dans Oz et Mr. Robot notamment, mais qui n’excelle pas vraiment dans Gotham). On suit donc dans les premiers épisodes l’évolution de Freeze mais aussi la découverte d’un paternel pour le Pingouin (joué par Paul Reubens dans une ambiance mi-Tim Burton à nouveau — ça tombe bien, l’acteur incarnait Pee-Wee — mi-Famille Adams), une parenthèse pas extraordinaire et extrêmement prévisible (mais esthétiquement appréciable). On assiste aussi à la montée en puissance de Nygma, quasiment la naissance du Sphinx avec un plan machiavélique incroyable et puissant qui débouchera sur l’incarcération de Gordon à Black Gate ! Une situation inédite et passionnante, qui permet aussi de se réconcilier un peu avec le jeu d’acteur de son interprète (Benjamin McKenzie).
Du côté de Strange, présent dans quasiment tous les épisodes, c’est un petit peu la porte ouverte « à toutes les folies » puisque ses expériences arrivent, entre autres, à ressusciter des personnes et créer des monstres… Un point dommageable puisque cela permet toutes les possibilités scénaristiques inimaginables avec un risque de perte de crédibilité. Ça ne loupe pas puisque Galavan revient à la vie et devient… Azrael ! Si le traitement du personnage (en costume) est plus ou moins respectueux des comics, l’homme sous l’armure n’est plus crédible mais quand il la porte il est imposant, puissant et magnétique. On espère tout de même un jour l’arrivée de Jean-Paul Valley en successeur (même si, dans le cadre de la série, ce serait une fois de plus trop en amont — cf. paragraphe plus bas). À signaler aussi, le retour (sans surprise) de Barbara Kean dans un double-jeu toujours aussi ridicule. Tout comme le couple improbable Butch/Tabitha… Sans réelle stupeur également, Fish Mooney revient avec en plus un « super-pouvoir » (on apprend quand même qu’elle était réellement morte). Difficile d’adhérer à 100% à ces renaissances et aux fameux « lavages de cerveau », c’est un parti pris facile, peu créatif, pas forcément crédible et plutôt dommage. On déplore aussi l’évolution trop risible de Firefly, pourtant bien amenée dans la première partie.
On retient donc de ces 11 épisodes principalement l’évolution de Nygma, les quelques scènes de combat d’Azrael en armure, le séjour de Gordon en prison, la découverte du meurtrier des parents de Bruce Wayne et l’avancement de ce dernier dans son combat pour la justice avec les terribles contraintes « légales » (ainsi que son admiration en voyant un costumé en cape, Azrael donc). Son apprentissage continue malgré lui et, là aussi sans grande surprise pour les connaisseurs des comics, la Cour des Hiboux est bel et bien annoncée (et devrait en toute logique être au cœur de la saison suivante). Les bonnes résolutions (et révolutions ?) du show se situent dans le casting de cette seconde saison avec les personnages de Nathaniel Barnes (Michael Chiklis) et Lucius Fox (Chris Chalk). Tout d’abord ils apportent un nouveau souffle de « bien », Gordon (et Wayne) ne sont plus les uniques artisans à œuvrer pour ce qu’ils estiment être la justice (au détriment de la loi). Ensuite, ils sont très justement interprétés, et enfin, les acteurs sont très charismatiques (se référer à cet article pour la liste de tout le casting et les appréciations de chacun).
Si Gotham a plusieurs défauts (déjà listés plus haut et dans les anciennes critiques) et que cette seconde partie de saison 2 s’essouffle un peu (il y a de bons moments tout de même, comme ceux évoqués plus haut), il faut reconnaître au show une certaine qualité sur le rythme (il n’y a jamais de temps mort), sur la photographie qui est toujours très soignée et sur la direction artistique plutôt correcte pour une série de ce calibre. On apprécie par exemple l’extérieur d’Arkham qui rend un bel hommage aux versions déjà connues. Les plus cinéphiles ou serievores aimeraient certainement un côté plus travaillé et original sur la mise en scène mais ce n’est pas très grave. Idéalement, à l’instar de la première saison, le nombre d’épisodes devrait être diminuer (16 ou 18) pour gagner encore plus en efficacité.
En prenant un recul nécessaire et avec un prisme de lecture axé « fan de Batman », on se doit de souligner une certaine inquiétude vis-à-vis de l’anticipation extrême de Gotham. Si l’on se fit à la chronologie plus ou moins officielle, les premiers pas du Chevalier Noir dans son costume ne doivent arriver que dans une dizaine d’années au minimum (quand Bruce a 21/22 ans). Bien sûr dans le cadre de la série télévisée — qui reste une adaptation avec donc des auteurs libres de s’inspirer des comics mais ne pas suivre à la lettre ce qu’ils estiment ou non, évidemment — il se peut que Bruce Wayne enfile sa cape plus tôt. Mais tout de même… plusieurs de ses ennemis emblématiques sont déjà présents (certains étant de base plus âgés que lui, cela fait bien sûr sens de les croiser déjà). Quelques uns ne sont pas encore affublés de leur véritable alias, d’autres ne sont même pas encore clairement des « méchants » mais beaucoup existent (ennemis mineurs ou majeurs) une décennie avant l’arrivée de Batman.
Le Pingouin, le Sphinx (Edward Nygma), Hugo Strange, Gueule d’Argile (apparu en fin de saison 2), Mr Freeze, Victor Zsasz, l’Électrocuteur (qui était risible en saison 1), Flamingo sont déjà là. Il y aussi la mafia et la police corrompue avec Loeb, Falcone et Maroni par exemple. Certains sont également montrés en tant qu’enfants ou adolescents comme Poison Ivy, L’Épouvantail, Firefly, Silence (Tommy Elliot) et d’autres évoqués par leur père comme Romain Sionis (donc Black Mask) et à nouveau Jonathan Crane (l’Épouvantail). On peut citer également Harvey Dent (Double-Face) qui est déjà présent et bien sûr Selina Kyle (Catwoman) même si ces derniers sont plutôt des « gentils » ou, au pire, des antagonistes (tout comme Azrael dans sa version définitive si elle vient un jour). Reste le Joker, qu’on a vu dans sa version « proto » et éventuellement Killer Croc, aperçu au détour d’un plan en fin de saison 2 (mais aucune confirmation que c’était bien lui). Et tout cela en moins de 45 épisodes ! C’est vraiment… énorme. Même si certains ne sont pas encore des ennemis ou ont encore un long chemin à suivre pour s’émanciper pleinement, nul doute que la série en montre « trop » et « trop vite ». Parmi les têtes connues les plus représentatives de la galerie de vilains de Batman, il ne reste (déjà) plus que Bane, le Chapelier Fou, Harley Quinn, Ra’s al Ghul et éventuellement Man-Bat et le Ventriloque. Soit à peine six (dont trois/quatre qui interviendront dans les saisons 3 et 4 si on a été attentif aux bandes-annonces et teasers), outch… La série doit prendre son temps, comme elle le fait brillamment avec le Pingouin et Nygma ; elle a à sa disposition une forte liste d’ennemis potentiels à utiliser, il faut piocher dedans avec parcimonie plutôt que de vouloir tous les montrer absolument ou d’en créer des ridicules.
C’est en cela que Gotham peine aussi toujours à convaincre réellement, par ce côté « fan-service » pas forcément utile. Il y a des aspects négatifs qui ont été très bien corrigés (le rythme et l’écriture), d’autres qui sont délicats à améliorer (le jeu d’acteurs de quelques-uns) et certains qui se doivent d’être gommés et remplacés par de meilleurs éléments, comme ce fut le cas, avec parcimonie, dans cette deuxième saison (suppression de personnages, focalisation sur les évolutions…).
En conclusion cette nouvelle salve d’onze épisodes est en-dessous des onze premiers mais comporte de sacrés bons moments de fulgurance. Globalement, cette deuxième saison s’en tire plus que bien et balaye sans problème la première qui cumulait trop de défauts. On est donc toujours en très bonne voie, le show a trouvé ses marques et s’améliore. En espérant que des ajustements qualitatifs arrivent en saison 3 mais on est clairement sur une série qui pourra passer plus facilement la postérité si les auteurs conservent le ton de cette saison 2 et, surtout, s’ils peaufinent les quelques défauts inhérents toujours présents.